L'outdoor à l'école, où en est-on ? Interview de Charlotte Blot, coach bien-être et professeur de sport
_Spécialiste de gymnastique aux agrès et de yoga, adepte du running, Charlotte Blot est **professeur d'EPS à Lille**. Elle y enseigne l'art de faire du sport en extérieur, "avec les moyens du bord". Persuadée que le contact avec la nature permet de stimuler notre physique tout en prenant soin de notre santé mentale, elle nous explique la place de l'outdoor dans l'école et ses bienfaits sur les ados._
Bonjour Charlotte ! Pourrais-tu nous parler un peu de ton parcours ?
**Charlotte Blot** : Je suis actuellement professeur d'EPS dans un collège à Lille, après avoir été professeur de yoga en entreprise. À l'origine, mon parcours sportif était plutôt orienté sur l'acrobatique et l'artistique, car j'ai fait** 15 ans de gymnastique aux agrès**. Après l'obtention de la licence en STAPS, j'ai enseigné l'EPS à Paris. Puis à la trentaine, j'ai eu envie d'activités plus douces, davantage tournées vers le bien-être. Je me suis alors formée aux activités liées au bien-être comme le yoga, pour les enfants et les adultes. J'ai exercé plusieurs années comme prof de yoga en entreprise, puis j'ai retrouvé mes collégiens lorsque j'ai déménagé à Lille !
Quelle est la place de l'outdoor aujourd'hui, à l'école ?
**Charlotte** : Je crois beaucoup aux vertus de l'outdoor. J'ai vu ses bienfaits sur moi, mais j'ai aussi lu dans de nombreuses **études en neurosciences**, récemment, qu'être en contact avec la nature [améliorait le développement cérébral et psychique de l'enfant](https://www.cerveauetpsycho.fr/sd/developpement-enfant/comment-la-nature-nourrit-le-cerveau-des-enfants-16802.php), notamment la mémoire, l'apprentissage du langage, la lecture, l'écriture, ou encore le **raisonnement**. Les enseignants sont de plus en plus nombreux à initier leurs élèves, y compris certains profs d'autres disciplines, qui trouvent que faire classe dehors fonctionne super bien !
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Mais nous ne sommes malheureusement pas tout à fait égaux à ce sujet. Les écoles situées en montagne, en milieu rural, ont évidemment un accès facilité. Personnellement, j'enseigne dans un collège situé dans un quartier relativement populaire de Lille.
Donc j'utilise les moyens du bord, parce que je crois profondément que le sport doit être **accessible à tous**, qu'importe son **niveau de sport** et ses **moyens financiers**.
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Pour ces raisons, j'utilise beaucoup la **course d'orientation**. C'est un exercice que j'apprécie beaucoup, parce qu'il permet aux élèves de sortir de l'enceinte de l'école ou du gymnase facilement, de se retrouver en forêt. L'objectif est de **tester ses capacités d'orientation et de repères**, en ville ou ailleurs. Ça les rend aussi responsables et autonomes et ça développe l'esprit d'équipe. Ces compétences sont indispensables toute notre vie.
Tu proposes aussi l'escalade à tes élèves : pourquoi ?
**Charlotte **: Ce que j'aime dans l'escalade, c'est la **prise de **risque. Je pense qu'au cours de notre vie, on sera toujours confrontés à des **choix difficiles**, à des périodes de doutes ou de stress. Je trouve que l'escalade permet de mieux gérer le stress lié à la prise de risque. Les élèves ont tendance à rester dans leur **zone de confort**, à faire des voies dont ils maitrisent le niveau de difficulté. Mon but est de les **aider à monter toujours toujours plus haut, jusqu'à la chute**... C'est une belle valeur qu'on peut enseigner. L'escalade permet aussi de **travailler la confiance en l'autre**. Il faut faire confiance à son assureur et son contre-assureur. Bref, il ne faut jamais oublier que le sport ne donne pas que des compétences motrices, mais aussi et surtout des **compétences sociales et méthodologiques**. Et clairement, ça leur servira toute la vie.
Est-ce que la pratique du vélo est aussi enseignée ?
**Charlotte** : Oui, depuis deux ans, on enseigne le _"savoir-rouler"_, qui invite les élèves à** apprendre le vélo**. Je trouve ça très intéressant parce que, en ville, en montagne, à la campagne, le **vélo se développe de plus en plus** et il peut aussi y avoir des risques parfois. C'est important de maîtriser cette pratique, parce que beaucoup de nos élèves n'ont pas la chance d'avoir de vélo à la maison. Avec cette compétence, ils peuvent potentiellement se déplacer autour de chez eux ou faire une randonnée le week-end.
Que faire pour permettre à tous les enfants et adolescents de découvrir l'outdoor ?
**Charlotte** : Je me rends compte tous les jours que les jeunes n'ont pas forcément connaissance de tout ce qui existe. Je pense qu'il faut **communiquer davantage **sur les bienfaits et l'accessibilité à l'outdoor. En utilisant les réseaux que privilégie cette génération, comme **Tiktok**.
Et puis il faut faire des **journées d'initiation**. Je pense par exemple à l'**aviron**. Les amener une journée, c'est génial pour leur faire **goûter à cette expérience**. Et sur place, c'est l'occasion de parler de toutes les autres pratiques nautiques, comme le canoë, le kayak, le paddle, qu'on trouve parfois au même endroit, dans les** bases nautiques.**
Quels conseils donnerais-tu aux parents pour aider leurs enfants à s'y mettre ?
**Charlotte** : Se rendre dans les zones de pleine nature située à proximité de chez soi, le plus souvent possible. En week-end, en vacances. Un pique-nique au parc, faire des jeux en pleine nature, explorer ce qui se passe autour de la maison, c'est déjà une aventure en soi.
On peut aussi tester l'**escalade**, il y en a partout y compris en milieu urbain, et désormais, grâce aux salles, il y a des tarifs préférentiels pour les enfants ou les personnes bénéficiant de faibles revenus.
Surtout, le plus **important** : faites sortir vos enfants ! Comme je le disais plus tôt, des études scientifiques ont montré que c'est en étant exposé souvent à l'extérieur qu'on développait nos neurones... Si vous les voyez en train de chatter avec leurs potes, proposez-leur de se rejoindre pour faire un cours de canyoning, de louer une planche de surf, juste de se balader.